Maîtriser l'analyse de données qualitatives

Que ce soit lors d’une démarche d’évaluation ou en planification stratégique, l’analyse de données qualitatives est une étape souvent incontournable. Par données qualitatives, on entend « […] des descriptions détaillées de situations, d’événements, de personnes, d’interactions, de comportements observés, de même que les pensées personnelles des gens au sujet de leurs expériences, attitudes et croyances[1]. » Ces données proviennent souvent d’entretiens individuels, de groupes de discussion ou même de sondages. Plusieurs logiciels comme NVivo ou QDA Miner permettent de faciliter l’analyse qualitative. Mais il est possible de se débrouiller avec Word ou Excel ou même avec un papier et un crayon.

Afin d’assurer une certaine rigueur lors de l’analyse, le codage thématique, méthode largement utilisée en recherche qualitative, peut s’avérer un outil très pratique. Cette méthode, pouvant être appliquée de différentes façons, vise simplement à catégoriser l’information afin de la rendre plus facilement compréhensible. Bien qu’il s’agisse généralement d’un processus plutôt itératif, il est présenté ici de façon linéaire, en quatre grandes étapes.

1. Lecture des données

Les données qualitatives auront habituellement été saisies sous forme de notes d’entretiens, de verbatim, ou se retrouveront dans les questions ouvertes d’un sondage. Une lecture attentive des données permettra de faciliter la suite du processus d’analyse, puisqu’il est fréquent de voir émerger certains codes ou certaines thématiques dès cette première étape.

2. Codage des données pertinentes

On retrouve communément une panoplie d’informations dans les notes d’entretiens et dans les sondages. Certaines de ces informations sont pertinentes, d’autres moins. Il est important ici de procéder à un élagage et d’identifier les données qui permettent d’apporter un élément de réponse à notre question initiale. On attribue par la suite un « code » à ces données en synthétisant les propos initiaux. Par exemple, imaginons une question qui porterait sur les pistes d’amélioration d’un projet collectif. La réponse : « Je trouve que les organismes qui travaillent sur le projet devraient se parler plus souvent. » pourrait être codée de la façon suivante : « organismes se parler plus souvent ». Il est important à cette étape de s’assurer que les données brutes reliées à chacun des codes soient clairement identifiées et puissent être facilement retrouvables, car elles seront essentielles pour l’interprétation des résultats et la rédaction du livrable final.

3. Fusion des codes similaires sous un code commun

Comme il est habituel que la même information se retrouve à plusieurs endroits, on procède généralement à la fusion des codes similaires, c’est-à-dire qui désignent la même idée, en un code commun. En effet, il se peut qu’à travers tout le processus de codage, une même information ait été codée différemment. Il est donc nécessaire de faire la relecture des codes et de fusionner les codes homologues. Par exemple, les codes « organismes se parler plus souvent » et « organisations partenaires plus en contact », qui font référence à la même idée, pourraient devenir « communications plus fréquentes entre organismes ». C’est à cette étape qu’il est possible d’ajouter une dimension quantitative en documentant les occurrences de chaque code, c’est-à-dire combien de fois une même idée a été évoquée. Cela permet de comprendre quelles idées ressortent de façon plus importante et quelles idées sont plutôt isolées. Selon la méthode de collecte de données utilisée, il n’est pas toujours possible de documenter avec précision la fréquence des codes. Il peut toutefois être intéressant de tout de même préciser le niveau de survenance de chaque idée, par exemple « mentionné fréquemment », « mentionné quelques fois » et « peu mentionné ».

4. Regroupement des codes appartenant à une même thématique

La dernière étape consiste à regrouper les codes homologues sous une même thématique, c’est-à-dire sous un concept plus large ou plus abstrait. Par exemple, les codes « communications plus fréquentes entre organismes », « avoir une base de données partagée » et « plus grande présence sur les médias sociaux » pourraient être regroupés sous le thème « communications », de même que « offrir un panier de services plus diversifié » et « adapter les services aux clientèles allophones » pourraient être regroupés sous le thème « services offerts ». Il est important de souligner qu’il n’y a pas vraiment de bonne ou de mauvaise façon de coder et de thématiser, l’essentiel est d’organiser l’information afin qu’elle soit intelligible tout en restant fidèle à la réalité.

Si vous avez utilisé plus d’une méthode de collecte (par exemple sondage et entretien), ou si vous avez fait plus d’un sondage ou plus d’un entretien (individuel ou groupe de discussion), vous devez reprendre le processus en construisant sur les codes et les thématiques précédemment identifiés, mais en gardant en tête qu’il est toujours possible de les modifier en cours de route. En contexte collectif, il est ensuite pertinent de présenter les résultats de l’analyse à un groupe d’acteurs clés impliqués dans le projet ou dans la démarche afin d’en faire l’interprétation (quelles sont les tendances transversales?, qu’est-ce qui peut expliquer les tendances observées?, quelles données sont plutôt isolées?, quels sont nos apprentissages?, etc.) et formuler des recommandations ou des pistes d’action pour la suite des choses.

Étienne Tessier, conseiller stratégique chez Dynamo

 

[1] Paloma-Wellesley (2011). Travailler ensemble : Le guide Paloma-Wellesley d’évaluation participative de programme, Toronto et Montréal : Paloma Foundation, Wellesley institute et Fondation J. Armand Bombardier, p. 79

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