Depuis la pandémie, nos façons d’organiser, d’animer et de faciliter des rencontres se fait de plus en plus en mode hybride. Que ce soit en interne ou en événement rassembleur, cette configuration qui mêle présentiel et virtuel s’amplifie. Un phénomène qui vient avec son lot de défis car l’hybridité ce n’est ni juste être devant son écran, ni juste être autour d’une table. C’est l’alliance des deux qui crée une situation unique et donc de nouvelles façons de faire.

Ces nouvelles façons, nous les avons apprises et développées chez Dynamo tout au long de la pandémie. L’esprit d’innovation et l’agilité dans lesquels nous évoluons nous ont permis de nous adapter. Très rapidement, nous avons créé un comité hybridité pour anticiper le retour en présentiel. C’est grâce à lui et aux apprentissages du virtuel que nous avons pu développer de nouvelles compétences en matière d’hybridité. Ces compétences, ces apprentissages, nous voulons les partager en se basant sur un cas d’école : les Grands Ateliers de la démarche Culture en Action! portés par Compétence Culture. Ce mandat a rassemblé près de 300 personnes œuvrant en culture autour d’une série d’ateliers, de conférences et de discussions via deux grands moments de rassemblements de 2 jours chacun : le grand atelier printanier et le grand atelier automnal. L’hybridité a été au cœur de ces quatre journées de rassemblement, favorisant la présence de personnes issues de tout le Québec et permettant des réflexions partagées en simultané.

1. Intention : définir le pourquoi avant de définir le comment

Disons-le franchement dès le départ : organiser un événement en mode hybride demande du temps et de l’argent. La première question à se poser est donc simple : pourquoi choisir l’hybridité ? Ici ce que l’on veut c’est définir l’intention. Celles et ceux qui travaillent avec nous savent que nous y attachons une grande importance. Et pour cause ! Il est primordial de se questionner les raisons qui nous motivent à choisir l’hybridité plutôt qu’un autre mode d’organisation : en quoi se met-elle au service de ce que nous souhaitons faire arriver durant notre évènement ? S’agit-il d’une volonté d’inclure le plus grand monde pour plus d’accessibilité ? S’agit-il d’une volonté de mobiliser le plus de personnes possibles ? Ces questions-là sont essentielles pour définir l’intention. Et définir l’intention est un prérequis pour la réussite de son événement. Plus elle sera claire, plus le processus sera au service de ce que l’on veut voir arriver.

Pour Compétence culture, définir l’intention des Grands ateliers et donc de la bonne utilisation de l’hybridité a clairement été l’une des étapes majeures du processus. Nous avons utilisé l’outil de design de rencontre revisité façon Dynamo pour ce faire. Cela nous a permis de ne pas tomber dans le réflexe de penser le comment avant le pourquoi. C’est à partir de là que nous avons pu définir les trames d’animation appropriées.

Événement hybride avec Compétence culture et Dynamo à Montréal
Photo ©Benoît Vermette

2. Design de rencontre : expérience virtuelle VS. expérience présentielle

Une fois l’intention précisée, nous pouvons nous diriger vers le résultat souhaité en passant par des étapes définies par une trame d’animation. Le défi avec le mode hybride c’est que ces étapes soient les mêmes pour les gens en ligne que pour les gens en présence alors que leur réalité diffère. Si les phases, les horaires, les livrables ou encore les types d’exercices sont les mêmes, leur déclinaison change que l’on soit en présence et en virtuel. Avec Compétence culture, nous avons donc réfléchi à une trame pour les personnes à distance et à une autre pour les personnes sur place. Pourquoi ? Parce que notre pratique nous a appris que :

  • En ligne, le temps est plus resserré : les temps virtuels de discussions sont plus balisés qu’en réel.
  • Les temps de transition sont plus longs en présence qu’en virtuel : entre deux activités, les gens sur place jasent, se déplacent, ramassent leurs affaires, etc. En virtuel, cette latence n’existe tout simplement pas.
  • La distribution de la parole n’est pas la même : en ligne, les gens se coupent moins la parole (avec le micro et/ou la caméra fermée).
  • L’accueil diffère en fonction de la configuration. En présence, les personnes inscrites arrivent, prennent un café, l’informel allonge le temps. En virtuel, l’accueil est plus efficace puisque les gens se connectent et sont déjà prêts.

Vouloir faire interagir personnes en ligne et personnes en présence lors d’un grand événement est rarement une bonne idée (bruits alentours, qualité de la technologie, prises de parole qui n’est pas la même, etc.). Ces exemples tirés du terrain rendent incontournable la réflexion autour des deux trames distinctes. Après avoir souligné les différences, il est maintenant temps de voir comment les articuler.

3. Mise en scène : de l’importance d’avoir de l’organisation humaine et matérielle

Un événement hybride tel que celui de Compétence culture nécessite de réfléchir à sa mise en scène. Il faut anticiper le déroulement, l’ambiance que l’on veut avoir, l’harmonisation des visuels, la musique et tout autre élément pour que l’événement soit cohérent autant en ligne qu’en présence.
Cette cohérence est intimement liée à la coordination des équipes sur place. Lorsque l’on parle d’équipes au pluriel c’est parce que d’expérience, il est préférable d’avoir trois équipes dédiées : la technique (chargée des caméras, ayant connaissance des connexions en virtuel, sait lorsqu’elle doit filmer, lorsque les micros sont allumés, etc.), l’équipe d’animation en virtuel et l’équipe d’animation en présentiel. Chacune d’entre elle interagit avec les autres. L’idéal est d’avoir un lien via oreillette ou un groupe de discussion instantanée. Dans le meilleur des cas, les équipes se trouvent en présence à proximité avec, chacune, sa trame d’animation précise. Fortes de ce soutien indispensable, les personnes qui animent ont toutes les chances de leur côté pour mobiliser dans les meilleures conditions. Soulignons pour finir l’importance de la qualité du matériel et de la maîtrise de la technologie. Car un évènement hybride réussi se doit d’avoir ses technicien·nes du son, des caméras, des écrans partagés, etc.

Panel de discussion lors des grands rendez-vous de Compétence culture à Montréal
Photo ©Benoît Vermette

4. Animer et mobiliser : les spécificités du mode hybride

Animer en mode en hybride, c’est penser à deux publics à la fois : un qui est en face de nous dans la salle, l’autre qui est sur écran. Deux publics différents qu’il faut considérer de la même manière. La posture d’animation doit donc prendre en compte quelques éléments :

  • Ne pas oublier de regarder la caméra et ne pas oublier que des gens sont sur écran
  • Arrimer les équipes en ligne et en présence pour avoir la certitude que tout le monde est au même niveau dans la trame : on ne peut pas, à titre d’exemple, clore une activité plus tôt en présence si les salles virtuelles sont encore ouvertes.
  • Optimiser les temps de présentation en commun (qui donnent le sentiment aux personnes en ligne et en présence d’être ensemble) et les temps dédiés à chaque configuration (temps de discussion en ligne pour les gens en ligne et en présence pour les gens en présence).
  • Utiliser une plateforme numérique de participation favorisant la récolte des idées sur un même médium que l’on soit en ligne ou en présence, ce qui augmente le sentiment de partager le même moment et le même évènement.
Un événement en mode hybride qui allie virtuel et présentiel
Photo ©Benoît Vermette

Si le mandat de Compétence culture nous a appris une chose, c’est que virtuel et présentiel se vivent différemment. Il faut donc distinguer ces deux réalités pour mieux les combiner lors d’un événement. Avec la généralisation de l’hybridité, la collaboration prend de nouvelles couleurs nous amenant à adapter nos postures d’animateur·trice, de faciliteur·trice et d’organisateur·trice. De quoi nourrir nos savoir-faire pour continuer à mieux travailler ensemble et nous adapter aux nouvelles réalités collaboratives.

Si l’on résume donc l’organisation d’un évènement hybride réussi :

  1. Clarifier l’intention de mon évènement et de la plus-value de l’hybridité.
  2. Créer trois trames pour le même évènement : une trame centrale sur le fil rouge, les objectifs, les livrables et blocs horaires; une trame spécifique à l’animation en ligne et une trame spécifique à l’animation en présence.
  3. Mettre en scène l’évènement avec des équipes dédiées et de la technologie adaptée.
  4. Avoir en tête le souci de l’inclusion et de la mobilisation de toutes les personnes présentes durant l’animation.